jeudi 25 juillet 2019

Album Review + Interview : Hands Off Gretel, le grunge made in UK ...


Est-ce que les Britishs de Hands Off Gretel vont enfoncer le clou est devenir un groupe de référence grunge avec leur deuxième album intitulé (pour le fait) I Want The World?
HOG est originaire du Sud du Yorkshire en Angleterre et est composé de Lauren Tate (chant et guitare), de Seán Bon (guitare), Sam Hobbins (batterie) et Becky Baldwin Bass (basse) qui a rejoint le groupe depuis peu. Après avoir sorti deux premiers EP en 2015 et 2016 : My Size et Be Mine ont planté tout de suite le décor en nous replongeant du coté du Seattle des 90’s.
                       
En 2016, sort leur premier album Burn The Beauty Queen, très attendu par les fans de Lauren mais aussi par la presse anglaise et qui reçoit même les éloges du magazine Louder Than War: “Il s’agit d’un grand album qui marque le début d’une grande carrière ...”. L’album contient plusieurs singles : One Eyed Girl, World Against She, Bad Egg et Plasters et le groupe enchaîne les concerts en Angleterre et traverse même la Manche pour quelques concerts en Allemagne mais aussi en Belgique.
Quelques mois après la sortie de leur premier album, sort Bedroom Sessions, au nom de Lauren Tate, issu de démos, de titres inédits et de versions acoustiques du premier album et des deux ep, qui font de cet album une véritable pépite à posséder par les fans.
HOG est avant tout un groupe live et chaque concert est une véritable explosion d’énergie, et si vous avez la possibilité de les voir sur scène, n’hésitez pas une seconde.
Avec I Want The World, HOG a remis le grunge des ‘90s au goût du jour et a trouvé de nouvelles pistes à explorer. On s’attendait à un bon album, mais pas de cette qualité. Le groupe a mis la barre haute avec des compos qui vous vous mettre dans tous vos états, et le son du mastering est vraiment très bon. C’est l’album idéal pour les beaux jours à venir de l’été 2019 qui saura mettre l’ambiance dans toute circonstance. Le groupe a gagné en assurance et, si vous les connaissez depuis le début, vous allez vous en rendre compte très vite. Lauren a travaillé ses textes pour qu’ils vous reste dans la tête, Sean s’éclate sur la Jag-Stang d’un de ses mentors nommé Kurt Cobain, Tom tabasse les fûts comme jamais, et l’arrivée de Becky a mis encore plus de piquant dans cette joyeuse troupe. Ce 2ème opus vous livrera 40mn de pur bonheur et si vous commandez directement l’album sur le site du groupe, ils vous laisseront un petit mot de remerciements avec. Allez donc faire un tour sur leur site : https://www.handsoffgretel.co.uk/
Lauren (artiste complète) ne fait pas qu’écrire les textes, chanter, composer et jouer de la guitare, elle s’occupe aussi du graphisme du groupe et nous plonge dans son univers coloré. Quelques jours avant la sortie de leur nouveau clip “It’s My Fault”, Lauren a répondu à nos questions pour la sortie de “I Want The World”.
L'interview
L'Alternative : Salut Lauren, est-ce que ta rencontre avec Sean a été l’élément déclencheur pour le lancement du groupe ?
Lauren : Sean et moi avions déjà travaillé sur beaucoup de titres chacun de notre côté en solo. À ce moment-là, nous avons tissé des liens de différentes façons et son style musical a eu une influence considérable sur moi. Quand je l’ai rencontré pour la première fois, je pensais que c’était le mec le plus cool que j’avais jamais rencontré. Il était ma muse pour créer une musique plus alternative. Avant de le rencontrer, je n’avais jamais rencontré quelqu'un qui comprenne mon amour pour le grunge et avec lui, cela ne fait que grandir. Je lui ai dit que je voulais créer mon propre groupe et nous avons partagé l’excitation de chercher un nom de groupe et d’improviser ensemble avec juste deux guitares et un microphone. Je pense que si cela n’avait pas été pour Sean, il aurait été beaucoup plus difficile d’écrire la musique que je fais maintenant. Il a une manière si unique de jouer de la guitare que personne ne pourra jamais le remplacer.
Comment s'est passé le processus de création et d'écriture du nouvel album ? Était-ce la même chose que pour le premier ?
En ce qui concerne l'écriture de cet album, j'ai beaucoup réfléchi au flux. Je savais que je voulais au moins une demi-douzaine de singles avec des refrains accrocheurs, qu'il me fallait des chansons pleines de sensibilité, presque des ballades, et des chansons bizarres. J’avais plus d’un plan en ce qui concerne l’ordre de classement de l’album, ce qui m’a vraiment aidé à l’écrire car je n’y suis pas allé sans but. J'avais l'impression d'être en mission lors de l'écriture de cet album. Les chansons me sont venues naturellement et surtout, je me suis beaucoup amusé à faire des démos et ensuite à les jouer avec le groupe. C'était assez facile en studio parce que je l'ai fait avec une idée très précise de la manière dont je voulais que ça sonne avec la production et avec les effets pour chaque instrument et toutes les harmonies imaginées. Avant tout, j’avais une compréhension très claire de ce dont parlait l’album et c’était ce qui m’a permis de me concentrer.
Est-ce que le groupe est plus girly depuis l’arrivée de Becky ?
J’ai toujours voulu une autre fille dans le groupe. Dynamiquement, ça fonctionne totalement avec les choeurs féminins aussi et j'étais sur un petit nuage quand Becky m'a dit qu'elle voulait rejoindre le groupe parce qu'elle est incroyable! Je pense qu’elle est un bonus, car il n’y a pas beaucoup de bassistes sur la scène. Indépendamment du fait qu’elle soit une femme, elle est badass* et l’une des meilleurs bassistes que je connais, bien plus badass* que la plupart des bassistes masculins que j’ai connus. Elle m’aide à me dépasser à la guitare, je regarde ses doigts à la basse et je me demande comment elle fait? haha!
*Badass = une personne qui déchire, qui a la classe
Avec le titre "I Want The World", êtes-vous prêt à conquérir le monde ?
Oh Oui! J'ai tellement appris sur moi-même et sur les autres au cours des dernières années. J’ai été blessée par beaucoup de gens et laissée tomber, me sentant souvent comme si le monde entier était contre moi. Maintenant, je sens que plus que jamais il est temps pour moi de rayonner et de chanter pour les exclus et d'être la voix de ma propre génération. Sans avoir la grosse tête, j'ai toujours su depuis mon enfance que j'allais devenir célèbre un jour et je consacre chaque jour de ma vie à la réalisation de tous mes rêves.
Certains médias prétendent que le rock serait mort, qu’as-tu envie de leur répondre ?
Je sens qu’il y aura toujours une place pour la musique rock. Surtout quand les gens veulent évacuer la colère. Le rock est aussi un genre très soul et sexy que les gens reviennent ou découvrent quand ils en ont assez de la musique plus douce. Quand j’ai découvert le rock, j’en écoutais à fond dans mes écouteurs et je me promenais dans l’école avec une sensation extraordinaire. Je me souviens de ce sentiment en écoutant des groupes très lourds comme Korn. En écoutant cette musique, je ressentais un sentiment de puissance que je ne comprenais pas en écoutant de la musique pop ou plus douce. Le rock donne vraiment du pouvoir et entendre des femmes crier dans le rock est l’un des sentiments les plus incroyables de liberté.
On t’a comparé à la “future Courtney Love” sur la fanpage de Courtney il y a 2 ans. Serait-ce l'un de vos rêves les plus fous que de faire un duo avec elle ? Haha! Je pense que je serais tellement timide si je rencontrais Courtney à coup sûr. Je ne suis pas vraiment fan de duos, ils me rendent vraiment nerveuse. Un de mes rêves les plus fous avec Courtney serait d’être réellement amie avec elle, de parler avec désinvolture de la musique sans paniquer comme une fan. Je déteste me sentir comme une fan haha, ça me rend si maladroite et c’est si embarrassant.
Avez-vous prévu des dates en France pour la promo du deuxième album ?
Nous aimerions beaucoup faire quelques dates en France et nous en examinons quelques-unes, mais rien n’a encore été confirmée. Nous avons beaucoup de fans en France qui me demandent de venir chez vous, alors je pense que nous devons vraiment le faire. Peut-être que sur le chemin pour l’Allemagne nous pourrions nous arrêter et faire quelques concerts!
Merci à Helen Tate de nous avoir donné la possibilité de réaliser cette interview avec Lauren.
Gian, mars 2019.

vendredi 5 juillet 2019

Interview : The Psychotic Monks : “Le live, c’est comme tenter de s’arracher la peau... pour se livrer en totale sincérité”

Venus fêter en grande pompe les 25 ans de l’Asso Sapristi à la MJC Calonne de Sedan - dans les Ardennes - le 13 avril dernier, les Parisiens de The Psychotic Monks - têtes de proue de la nouvelle vague du rock psychédélique et noisy français - ont accepté de forcer leur nature réservée et de répondre à nos questions à l’occasion de la sortie le 29 mars dernier de leur 2ème bijou, “Private Meaning First”. Rencontre avec 4 grands timides pétris de talent...
L'Alternative : Salut les 4 Monks ! L'enregistrement de l'album s'est fait perdu au milieu de nulle part. Était-ce primordial pour vous d'enregistrer cet album loin de tout, coupés de toute civilisation ?
The Psychotic Monks : On ressentait surtout le besoin de briser les cercles dans lesquels on était. Il y a un mouvement dans lequel on est depuis un moment maintenant, on est à la fois tout le temps et jamais vraiment en tournée, car on part presque toutes les semaines et on revient aussitôt dans notre local pour continuer le travail. Il y a du coup peut-être une certaine routine, une certaine posture de sécurité qu’on pouvait avoir avec ce rythme à force, et puis notre local à Saint-Ouen est un peu notre chez-nous, donc il y a aussi un certain confort duquel on voulait s’extraire.
On voulait effectivement s’arracher à ce décor que l’on connaissait bien pour se retrouver à nu, dans un endroit inconnu, hors de notre territoire de confort et de notre contrôle, pour se poser les questions profondes que l’on a besoin de se poser quand on veut travailler sur un nouveau disque, et se confronter à nous-mêmes, sans subterfuges. Le fait d’avoir travaillé à la genèse de ce disque coupés de toute civilisation, dans une maison bien trop petite pour nous 4 et notre matos, n’était pas réfléchi à l’avance. Il s’avère que ça a beaucoup influencé ce disque, mais c’est une conséquence et non un calcul. On n’est pas parti de Saint-Ouen et de cette hyper-sollicitation-agitation humaine dans un but précis, consciemment, pour produire un disque particulier. On est juste parti car on avait besoin, peut-être de se retrouver seuls avec nous-même, et par un concours de circonstances, on s’est retrouvé dans un des endroits les plus isolés qu’on ait connu jusqu’alors. Et forcément, ça a eu des conséquences sur la musique… Mais je ne dirais pas que c’était primordial, ça s’est juste passé ainsi, comme ça aurait pu se passer autrement.
L'album est vraiment chargé au niveau émotion. D’où vous est venue cette inspiration ? Qu'aviez-vous à faire ressortir de manière si subtile ?
On avait sûrement accumulé beaucoup de choses depuis l’enregistrement du dernier. On a vécu des expériences complètement dingues, à la fois libératrices, grandissantes, mais aussi difficiles, et violentes. On a rencontré beaucoup de monde, cette hyper sociabilité est une chance pour les grands timides que nous sommes, mais ça peut aussi avoir quelque chose d’essoufflant. On a vraiment envie d’avoir cette posture de vraie rencontre, d’ouverture, de discussion quand on est en tournée. Après tout, le but c’est de partager quelque chose de fort et de sincère, alors ça nécessite que l’on prenne des risques, que l’on se mette en danger et que l’on se livre, et c’est à chaque fois une expérience forte. Je vois ça comme si on tentait de s’arracher la peau, qui nous cloisonne quotidiennement, pour se livrer en totale sincérité et nudité en public. Souvent, ça fait du bien, mais ça reste assez violent. Et on n’y arrive pas tout le temps…
Ca tient aussi au fait que l’on se pose beaucoup de questions sur le monde dans lequel on vit, que l’on essaie de comprendre ce joyeux - triste - bordel, et peut-être qu’inconsciemment, tout ce que l’on ressent par rapport à l’époque contemporaine, s’accumule et a besoin de sortir, de s’extérioriser.
La musique est vraiment devenue pour nous un exutoire, un moyen de canaliser les émotions et les pensées qui nous traversent, un peu comme une thérapie. Si ça se ressent à l’écoute, ou même si ça permet à une ou deux personnes de se sentir un peu moins seules, un peu plus libres, alors c’est génial…


Êtes-vous conscients que cet album est une véritable oeuvre d'art, tant par la musique que par le visuel. Si on vous dit que pour l'équipede L'Alternative, il vaut un “Kid A” ou un “Amnesiac” de Radiohead chargé de Pink Floyd et de Iggy And The Stooges, que nous répondez-vous ?
On ne peut pas être conscient d’une telle chose, c’est impossible à prendre, une telle comparaison… On peut difficilement se comparer à des groupes qui ont autant bouleversé notre vie et dont on s’inspire. Pour nous, “Kid A” est un chef d’oeuvre, il aura toujours une répercussion sur notre manière d’envisager la musique, comme quelques autres grands disques.
C’est vraiment très cool et encourageant de vous lire, mais non, pour nous c’est impensable, et plus on avance, plus c’est toxique pour nous de se comparer à d’autres groupes.. Qu’on arrive ou pas à un niveau de révolte comparable à ces artistes, ce n’est pas la question. On se dit plutôt que quoi que l’on fasse, on a encore du pain sur la planche, et beaucoup de travail devant nous !
En tout cas si vous avez ressenti quelque chose comme ça, c’est un immense compliment. Que l’on ne pourra pas digérer !...
Depuis vos débuts, vous enregistrez vos albums sur un 8 pistes à bandes. L'analogique est-il vraiment important pour vous ?
Il doit y avoir un petit quiproquo quelque part car malheureusement, on n’enregistre pas encore sur de vraies bandes… Bien sûr que l’on aimerait le faire un jour !
L’analogique a une puissance de l’instant et de la pureté très importante pour nous, mais on ne se cantonne pas à une certaine posture, on se dit plutôt que tous les moyens sont bons pour arriver à fabriquer quelque chose qui porte du sens. C’est à la fois important de se demander quels moyens de production correspondent le plus à ce que l’on veut raconter, mais aussi d’expérimenter avec les nouvelles technologies et les découvertes récentes pour se retrouver avec des erreurs dont on pourra “profiter”, ou des résultats que l’on n’aurait jamais imaginés !
Sur quel support nous conseillez-vous d'écouter “Private Meaning First” ?
Sur disque ou vinyle, en tout cas plutôt en physique, car ça nous permet de vous proposer vraiment notre montage sans coupures dues à la connexion par exemple, notre véritable voyage. Et ça permet d’investir dans du physique et non de supporter les plateformes capitalistes... lol.
Ce qui importe le plus, en dehors du format, ce serait plutôt les conditions de l’écoute. C’est un disque dont on pense qu’il lui faut du temps et de l’espace. Donc peut-être une pièce volets fermés, avec une bonne sono et surtout 1 bonne heure de son temps sans interruptions, un peu comme si vous alliez au cinéma par exemple.
Quel a été le souvenir le plus insolite de votre dernière tournée ?
Difficile d’y répondre, car on a un peu l’impression que tout est constamment insolite... Peut-être le concert aux Trans Musicales de Rennes... On a eu la sensation de ne pas avoir de prise sur ce qui s’est passé, un peu comme si pendant une heure, nous étions observateurs de la situation, et qu’il s’opérait une sorte de folie collective. Et une folie collective de 4000 personnes, ça fait flipper !

Certains médias affirment que le rock est mort. Qu'avez-vous envie de leur répondre ?
Tout dépend de ce que l’on appelle “rock”. Pour nous, le rock n’est peut-être pas un genre musical ou une esthétique, ce serait plutôt une certaine révolte par rapport aux normes et aux formats, un certain mode de vie, la non-compromission dans le fait d’être constamment en remise en question, en lutte. Et en ce sens, non seulement le rock n’est pas mort, car il vivra sûrement encore longtemps à travers ceux qui cherchent à arracher leurs peaux, mais on pourrait même pousser et dire qu’il existe depuis bien plus longtemps que ce que l’on pense communément. Finalement, Beethoven, Molière, Van Gogh ou Galilée c’est peut-être aussi du rock ?... (sans vouloir se comparer à ces génies..)
Merci les Psychotic Monks d'avoir répondu à nos questions...
Merci à vous !
Gian, avril 2019

jeudi 4 juillet 2019

Review + Interview : Reagann sortie de leur 1er album “Licking The Eyes Of Drones”

A une époque où le rock est redevenu underground dans l’Hexagone, et où certains médias portent aux nus des artistes à la vacuité musicale et intellectuelle - tels que Jul, Maître Gims, Vianney ou Christine & The Queens -, la production musicale indépendante française n’a jamais semblé aussi qualitative en terme de rock. Les nombreux groupes méconnus sortis du bois - et de l’anonymat - ces 2 dernières années en sont un magnifique : The Inspector Cluzo, The Limiñanas, Kaviar Special, Prohibition Dead, Springwater, Johnny Mafia… (liste non exhaustive). Et au sein d’une Armorique qui résiste plus que jamais à l’envahisseur coexiste une tribu de bardes dévoués à la cause de la sauvegarde du rock noisy, du garage et du grunge. Parmi lesquels un groupe cher à notre coeur et à celui de la Pearl Jamily France : Reagann.Joyeux trio composé de Cyril - aka Cyb - à la guitare & au chant, de Firecracker B à la basse & au chant, et de Max à la batterie & au chant (parce qu'on n'a rien inventé de plus efficace qu’un trio depuis l’avènement du rock !), Reagann est basé dans la belle ville de Rennes et sévit donc principalement en terre bretonne. Le combo originaire de Condate - NDLR : nom gallo-romain de Rennes - mixe avec bonheur ses diverses influences, allant du punk rock de Iggy And The Stooges au grunge de Pearl Jam et Soundgarden, en passant par le noise rock de Queens of the Stone Age. Et blablabla… (comme l’indique le groupe dans sa bio).
Comme Noël arrive à grands pas, c’est Reagann qui régale… et revêt son plus bel habit de Santa Claus pour nous livrer son 1er album “Licking The Eyes Of Drones”. Un opus infusé de rock et de grunge où flotte le Saint Patronage de légendes du genre, comme le regretté Chris Cornell ou le mythique Eddie Vedder. Après 3 sessions de voix et de mixage en compagnie de leur garde rapprochée - Ted Beauvarlet au son & au mixage, Sebastien Lorho au Master, Ian Dilly à l’enregistrement & au mixage sur “Tomorrow Bunker” et Jules Mc Coy aux guitares supplémentaires sur “Shadows” - et des mois de galères, d’incertitude, de doute et de travail, le trio nous offre ce sublime 1er opus, fatras improbable de 11 titres rock / punk brutaux où - certes - tout n’est pas parfait mais qui s’annonce néanmoins comme une déclaration d’intention de la part de l’un des groupes les plus prometteurs de la foisonnante scène rennaise.Débutant par une bonne braillée façon metal, le rock de ce disque est tel qu’on l’affectionne : sans fioritures, brut, à l’état sauvage, avec la rythmique de basse fluide et une batterie qui tape vraiment fort et juste. Riche de ses 11 titres pour autant d’uppercuts au foie et d’aventures musicales oniriques où chaque instrument est en interaction permanente avec les autres - comme une sorte de jam géante - “Licking The Eyes Of Drones” ne manquera pas de vous laisse groggy, et sonne comme une véritable ode au plaisir. Car oui, on sent bien que nos 3 larrons s’éclatent comme des bêtes… et du coup, nous aussi !
Avec ce joyeux bordel punk / rock / grunge inattendu doté d’une avalanche de riffs vengeurs à vous scotcher et à vous clouer au sol, Reagann ne cherche pas à “copier” ses idoles, mais bien à faire du Reagann… et c’est ce que nous attendions avec impatience. Même si cela sonne parfois légèrement comme un grand n'importe quoi pas toujours identifiable, on s'en fout, on adore ! Ce “Licking The Eyes Of Drones” se montre digne de ses influenceurs et ouvre de merveilleuses perspectives au trio rennais, dont mon petit doigt me dit que nous n’avons pas fini d’entendre parler...
Ne nous mentons pas… Si votre truc c’est d’écouter du Vianney en sirotant du Vittel fraise, du Champomy ou une verveine menthe - pauvre de vous ! - dans la chaleur douillette d’un feu de cheminée, vous allez détester cet album. En revanche, si vous ne vous épanouissez que dans un univers fait de riffs (souvent), de distorsions (parfois) et de plaisir (toujours) où le son de Seattle des années 90 est roi et où vous ne prenez la pleine mesure de celui-ci qu’à l’épreuve du live, en remuant du steak et en dégustant une bonne boisson houblonnée, ce “Licking The Eyes Of Drones” est fait pour vous… et il est probable que vous ne puissiez vous en départir, tant ce disque sonnera comme un objet familier, une partie de vous-même qui vous aidera à oublier les tracas du quotidien et vous dépoussiérera les tympans.

Même si depuis quelques années, certains sonnent le glas du rock breton, nous n'avions jamais été convié(e)s à des funérailles en bonne et due forme et force est de constater que ce "Licking The Eyes Of Drones" donne la réplique à ces oiseaux de mauvaise augure, et annonce le renouveau d'un joyau du rock rennais. Avec ce son brut “qui cogne”, diversifié et néanmoins d’une efficacité chirurgicale, Reagann sonne la révolte et nous entraîne dans son sillage.
Si - selon le titre de l’un de ses morceaux - il est possible que Reagann ait tué Nixon, ce qui est certain par contre, c’est qu’avec ce “Licking The Eyes Of Drones”, les Rennais ont tué le game. Qu’on se le dise, si les chamailleries se feront toujours incessantes quant au sempiternel débat pour savoir qui de Rennes ou de Nantes est le chef-lieu de la Bretagne, en revanche, Rennes est sans discussion possible la Capitale du Rock et du Garage français, avec à sa tête des groupes comme Kaviar Special, Albatross, Zumma ou Reagann. Que la fête commence... Rock & Chouchen !
La note de Manu : 8.5/10
“Licking The Eyes Of Drones” de Reagann, LP 11 titres sorti le 14 novembre 2018 en Auto-Production
https://reagann.bandcamp.com/album/licking-the-eyes-of-dronesAprès avoir pris une bonne dose de rock, retrouvez l’interview de Cyril - le chanteur de REAGANN - par Gian… Keep On Rockin’ In A Free World !
Gian : Salut Cyril, quand on écoute votre 1er album, on s'aperçoit que vous n’en êtes pas à votre coup d'essai et que le projet Reagann est dans la continuité de ce que vous avez produit jusqu’à présent. Peux-tu nous en dire davantage sur vos parcours musicaux avant Reagann ? Et comment est né ce projet Reagann ?Cyril : Effectivement, ça fait un moment que les membres du groupe écument cafés-concert et salles du grand ouest pour faire du rock à fort volume. Max R le batteur jouait du côté de Saint-Brieuc avec, entre autres, The Obvious, tandis qu'avec Firecracker B on montait Puzzle of Skin, puis Last Avalon Drugstore sur Rennes. Est arrivé le quintet Golden Age of Monkeys qui nous a rassemblés. Un mélange punk-metal, de supers concerts dans la foulée, un 6 titres (“Many Reasons To Smile” - autoprod) + participations compils... Mais des dissensions musicales sont apparues et GAOM s'est dissout.Reagann est né quelques mois plus tard, début 2015 avec Firecracker B (basse, choeurs), Max (batterie, choeurs) et moi (chant lead, guitare). On a maquetté un quatre titres au Nevermind Studio avec Ian Dilly (In a Nutshell, Hand of Blood, Ian, Owly Shit...), on a testé “Modern Citizen” sur scène et puis on s'est enfermé dans les locaux de répé pour composer le reste. Comme le EP des Golden Age of Monkeys avait été enregistré au Studio la Licorne Rouge de Rennes, et qu'il restait là-bas des bandes inexploitées dont la base basse/batterie me parlait beaucoup, on a décidé de travailler à nouveau avec Ted Beauvarlet l'ingé son de la Licorne. Plusieurs sessions d'enregistrements, mixage de nouveaux titres, rajout de grattes et de chant sur deux des bandes inexploitées (qui allaient devenir Shadows et Silent Corp)... Après un master au studio Near Deaf Experience par Seb Lorho, l'album était enfin là.
Si je te dis que votre album nous replonge un peu dans la France des années 90, avec une sorte de son punk / grunge émergent mélangé à diverses influences des années 80. ça te convient comme analyse ?
Totalement. On a tous les trois baignés dans cette étrange zone qu'étaient les années 90. Sous la surface il y avait eu ce rock alternatif obscur des années 80, de Joy Division aux Dead Kennedys en passant par Noir Désir, The Cure, Metallica, The Jesus Lizard, les Pixies ou Hüsker Dü. Et du jour au lendemain (ou presque) est arrivé le grunge. Le rock alternatif est devenu roi. Pour ma part, j'ai plongé dans la scène de Seattle, écoutant le Big Four en boucle (et tout ce qui s'en rapprochait comme Mudhoney, TOTD, les Screaming Trees, Green River...), tandis que Max écoutait Emperor, Fugazi, tous les projets de Mike Patton et Gojira. Firecracker B voyageait entre les Thugs, PJ Harvey, Soundgarden, Helmet et le Velvet. Il aura fallu quelques années pour mixer nos diverses influences, épurer notre jeu et aller à l'essentiel. Grosses distos, amplis à lampes, batterie qui latte et paroles déprimantes, politiques ou ironiques. C'est vrai qu'avec les mêmes ingrédients Mark Arm avait appelé ça grunge il y a bientôt 30 ans.
À l'époque (les 90's), je voyais Rennes comme une petite Seattle : beaucoup de groupes de zik, de micro labels, une multitude de style et peu de grosses têtes d'affiches internationales à venir jouer dans le coin ; la même config en plus humble que Seattle en 86/87. Les choses ont un peu changé depuis, et pour ma part j'ai réussi à me débarrasser de mes tics vedderiens au chant !
Mais quand on compose, qu'on improvise, on ne pense ni au rock ni au grunge. C'est un moment hors du temps où tout est possible. Et Max n'est pas très grunge !
Avez-vous des concerts prévus prochainement en Bretagne et dans l'Hexagone ?
Pour les précédents groupes qu'on a montés, on travaillait un set, prêt ou pas on le jouait sur scène dès que possible, et un jour, si on avait le temps, on enregistrait. Cette fois on a décidé de faire l'inverse, de prendre notre temps en studio, d'être content du résultat, d'en choisir et maîtriser l'ensemble pour, dans un second temps, nous lancer dans les concerts en travaillant quelques ajustements (sur certains titres on a enregistré 3 guitares en studio, et je suis seul gratteux sur scène). Maintenant c'est le moment de jouer ! On prépare une série de concerts sur le premier semestre 2019, surtout en Bretagne, avec d'autres groupes locaux, pour après nous aventurer vers Paris. Tout n'est pas encore calé mais on y travaille. C'est assez jouissif de sentir ces morceaux vivre hors du studio.
Cet été tu as repris “Rearviewmirror” de Pearl Jam sous le patronyme de Smell As You Are pour l’album “State Of Wine And Cheese - A French Tribute To Pearl Jam” avec des membres de Central Massif et You'll Brynner. Ca a dû être un bon kiff à reprendre, non ?
Yes !! Quand tu as lancé ton appel pour le tribute, j'ai tout de suite dit OK. Et puis c'est pour une bonne cause puisque tous les bénéfices de cette compilation vont à une association caritative (Pour le sourire d'Isaac). Problème de calendrier, les autres Reagann n'étaient pas dispos. Comme j'avais déjà joué avec Arno (le batteur de Central Massif), il m'a parlé de Ben son bassiste que je connaissais pour avoir assisté aux concerts de CM. Ben a tout de suite accepté et m'a présenté Matt un ami Batteur avec qui il a formé Smell As You Are un groupe de covers rock. Voilà comment tout ça est venu. On a un peu accentué le côté punk de Rearviewmirror, tu ne trouves pas ?
Pourquoi avoir choisi de reprendre cette chanson précisément ?
Pearl Jam a des dizaines de titres géniaux ; dur de choisir. J'hésitais entre “Corduroy”, “Footsteps” et “Rearviewmirror”. Tu m'as déconseillé “Footsteps” (déjà pris par The Ropes). Ben avait une préférence pour “Rearviewmirror”. Le peu de temps dont on disposait a décidé pour nous. On était tous pris à droite à gauche, surtout Matt qui joue dans plusieurs formations rennaises (You'll Brynner, Février, Formica...) et s'occupe du label Brainstorming Records. Une seule répé a pu être calée avant les 4 heures d'enregistrement gérées par Arno. Comme Matt a dévoré “Vs” dans sa jeunesse et qu'il connaissait “Rearviewmirror” par coeur à la batterie, le choix était évident. Et comme c'est avec “Vs.” que j'ai moi-même pris une grosse claque musicale à l'époque, ce titre fait sens pour moi.Certains médias affirment que le rock est mort. Qu’aurais-tu envie de leur répondre ?
Qu'à Rennes, ce genre d'affirmation tout le monde s'en fout. “Shells”, un titre de notre album, avec une mélodie qui me rappelle Fugazi, commence comme ça : « Rock and roll is dead again ». Tu sais, des journalistes blasés ont un coup de mou durant les périodes creuses, alors ils râlent de ne pas voir venir de nouvelles têtes, disent que tout est fini, sombrent dans l'alcool et pleurent sur la tombe de Brian Jones... Mais ces médias dont tu parles, tu ne les vois jamais aux concerts rock dans les cafés-concert ou les petites salles.
Choisir un support pour exprimer son mal être ou son amour de l'univers est inscrit dans notre ADN depuis au moins quarante mille ans (quand tu vois ces dessins incroyables dans la grotte Chauvet...!), et le rock est un moyen efficace, au même titre que la noise, le rap, l'électro ou d'autres, pour foutre une bonne claque dans la tronche apathique du monde. En ce sens, il ne disparaîtra pas de si tôt. Et ces temps-ci il y a quand même IDLES, The Limiñanas, Kaviar Special, Greta Van Fleet, The Fever 333 et une flopée de nouveaux groupes dont certains que j'ai découverts grâce à votre émission “Totalement Rock” (comme J.C.Satàn) ! Et puis il y a Reagann...
Manu et Gian, décembre 2018.

mercredi 3 juillet 2019

Interview : Pogo Car Crash Control : "On flirte avec le métal"


Ils sont jeunes, bourrés de talent et font un vacarme de tous les diables, c’est Pogo Car Crash Control ou P3C (comme vous voulez). Suite à leur concert donné dans les ardennes en avril dernier, Oliv’ (chanteur/guitariste) vous a offert un peu de son temps entre 2 dates pour une interview exclusive pour en savoir un peu plus sur ce jeuneDe Gauche à Droite : groupe en pleine ascension à l’avenir très prometteur.


De gauche à Droite : Olivier, Simon, Lola et Louis
L'Alternative : Salut Oliv’ le groupe existe depuis quelques années maintenant, pouvez nous dire comment s'est monté le groupe ?


Oliv’ : A la base on jouait dans les groupes du lycée mais Pogo Car Crash Control s’est formé direct après le BAC. La formation à bougé jusqu'à ce qu’on signe en maison de disque et qu’on rencontre Lola (à la basse) en 2016. C’est à partir de là qu’on a pu sortir officiellement notre premiers disque.
Vos textes sont uniquement en français, est ce un choix ou est ce que vous n'aviez pas envie de vous casser la tête à traduire vos idées en anglais ?
On a voulu dès le début chanter en français parce qu’il était important pour nous de parler de ce qu’il nous semblait être notre quotidien. On à grandis en banlieue parisienne lointaine donc l’ennui, la galère et les excès de consommation ont été le terreau de notre inspiration. Ça à été un début, ensuite avec les années on a dépassé ce stade pour quelque chose de plus habile. N’importe qui peut se retrouver dans des chansons comme « Conseil », « Crève » ou « Déprime Hostile » parce qu’elles s’efforcent de transformer en énergie des sentiments négatif parfois trop abstrait pour être compris par soit même.
Qu'elles sont les groupes qui vous ont le plus influencés à vos débuts ?

Pour ma part c’est Jay Reatard qui à débloquer quelque chose en moi. A travers lui j’ai compris qu’il était à la porté de tous d’écrire, enregistrer et jouer ses chansons sans l’aide de personne. J’ai commencer à m’intéressé au sons et à acheter du matos, on sortait régulièrement des chanson sur internet ce qui nous permettais de jouer assez souvent. Sinon musicalement, on sonnais plutôt punk rock à l’époque alors qu’aujourd’hui on flirte avec le Metal.
Vous écoutez quoi en ce moment ?
Essentiellement du hardcore et notamment les groupe que je découvre en concert : Candy, Backtrack, Coilguns, Baptist, Defeater, Power Trip, Youth Avoiders, Turnstil, Terror, Code Orange…
Peut-on vous considérer comme un groupe de grunge hardcore déjanté ?
Oui tout à fait j’aime bien cette définition. Il faudrais peut être inventer un terme pour définir la musique qu’on joue parce que personne ne s’accorde sur un genre. On peut dire Grun-Core !
Vous avez joué à peu près partout en France, que ça soit en salle ou en festival, qu'elle serait l'un de vos souvenirs les plus insolites ?

On rentre dans la catégorie « interdis au moins de 18 ans » là … ! J’en ai une mignonne : On sortait d’un bars à St Malo après avoir bu comme des cochons et on a pris d’assaut un galion de pirate sur le port. On grimpait hyper haut sur les cordages comme dans les films ! C’était hyper dangereux quand j’y pense, vu notre état. Ensuite on est rentré en Camion et on s’est embourbé dans un champs de betteraves. Il étais 5h du mat. Le lendemain le fermier nous a sortie de la avec son tracteur.
Vous avez joué sur la War Zone du Hellfest et également sur la Spitfire Stage du Download l'année dernière, y a t'il eu un avant et un après Hellfest/Download ?

Je crois qu’a partir du Hellfest on a été adoubé par le public métal. C’est carrément cool je trouve. Parce qu’à l’origine on n’était pas invité sur les concert Extrême. Le chant en français, notre son un peu garage… ce mélange ne faisait pas de nous des gros dures. Et depuis ces deux dates, les puristes ont du respect pour nous et surtout on partage la scène avec des groupes qu’on kiff.
Je vous ai vu il y a peu de temps sur scène pour la première fois, et je me suis demandé :"Ils ont mangé quoi avant de monter sur scène ?" Avez vous un régime spécifique avant de jouer en live qui vous donne cette rage et qui contamine aussi le public ?


Oui bien sûr, sur la fiche technique il est précisé de nous livrer des animaux type chiots, mini chats et poussins.
Déprime Ostile est sorti il y a un an déjà, est-ce qu'un deuxième album serait prévu pour les mois à venir ?

Exactement ! On rentre en studio début de l’hivers.
Comment ça se passe chez P3C lors de la composition de nouveaux morceaux ?
On est un groupe donc on fait évoluer les morceaux ensemble mais ça commence toujours par des chansons que je fais chez moi ou que Simon amène.J’ai maquetter tout le prochain disque dans ma petite chambre à Vitry sur Seine toute l’année dernières. Plus les morceaux évoluent en répétition, plus je modifie les maquettes et finalement on arrive à quelque chose de complet ou chacun trouve sa place.C’est comme ca qu’on travaille en ce moment pour le prochain disque.
Nous avons tous vu sur votre fb que tu t’es fait arracher des dents récemment, des idées de textes vont sont venus du coup ?
Ahaha, a part annuler deux concerts non ça n’a pas eu d’incidences particulières.
Certains me(r)dias affirment que le rock serait mort, qu'avez-vous envie de leur répondre ?

J’ai envie de leur dire que : «c’est celui qui dit qui l’est », na ! Personnellement je découvre des groupes géniaux toutes les semaines, qui ne joue pas une musique « déjà entendu » et qui on du public pour ça. Donc j’ai envie de dire que les gens/ média qui affirment une telle connerie ne sortent tout simplement pas voir de concerts.

Merci Oliv’ d'avoir répondu à nos questions, à bientôt sur la route.

Gian, Mai 2019.