mardi 16 novembre 2021

Live Report : Last Train/Bandit Bandit live à Troyes le 13.11.21

 


Il m'aura fallu 1 an, 8 mois et 10 jours avant de remettre les pieds dans une salle de concert (soit 620 jours pour être exact). Vous allez me demander si il n'y avait pas de concert intéressant à voir avant ? Si bien sûr, mais je voulais absolument recommencer à ressortir  en concert avec le groupe qui me fait le plus vibrer depuis 2015 ... Last Train. Et c'est Nos Rêves Font Du Bruit qui a exaucé mon souhait le plus cher en organisant son premier festival à Troyes ce 13 novembre 2021 (date hautement symbolique et chargée en émotions). Et cerise sur le gâteau de la taille d'une pastèque (si vous me permettez l'expression), ils ont également réussi à faire venir les Bandit Bandit que je suis et soutiens depuis le jour de la sortie de leur premier single "Maux". J'ai eu la chance de voir ces deux groupes au Trianon à Paris en novembre 2019, et j'arrive encore à me mettre les poils rien qu'en repensant à cette soirée plus que mémorable. Donc, il m'était impossible de rater cet événement. Et j'ai appris pendant la soirée que c'était Matthis des Balcon 76 qui avait eu l'idée de lancer ce festival à Troyes, et bien merci mec !!! Car toutes les personnes présentes en sont ressorties avec des étoiles plein les yeux. J'ai malheureusement raté les Balcon 76 qui ont ouvert la soirée, mais les quelques vidéos que j'ai vu passé sur les réseaux étaient vraiment excellentes. Je suis arrivé une quinzaine de minutes avant que les Bandit Bandit arrivent sur scène, et lorsque que je suis entré dans la salle, le public était présent et avait l'air d'être heureux de se retrouver après cette sombre période que nous venons de traverser tous ensemble.



Ça y est les lumières s'éteignent. Antho (le batteur), Ari (le guitariste/bassiste) et Hugo (guitariste) arrivent sur scène et entament les premières notes du single "Néant", extrait de leur 2ème ep Tachycardie sorti en juin dernier, avant de voir Maeva arrivée sur scène. Le set du groupe est excellent et envoie à la perfection leur rock teinté de néo-psyché (comme me le disait Hugo dans l'interview qu'il m'a accordé cet été, qui est à lire ici), au public Troyen qui est littéralement conquis. Le groupe a gagné en assurance sur scène, et est en pleine forme ce soir, et le public est bien réactif. Le quatuor était venu jouer la première fois à Troyes au The Message (disquaire que je vous conseille si vous passez dans ce coin) en octobre 2019, et n'a pas oublié de l'évoquer pendant son concert, et j'avais eu l'immense honneur de les interviewer avant ce show case (interview à lire ici). La casi intégralité des titres du groupe est jouée, et le set a une dynamique incroyable. Nous avons eu "Fever", "Siamesse Love", "Maux", "Tachycardie" ... sans oublier le magnifique "Désorganisée" introduit par un petit message de Maeva évoquant le #morewomenonstage, lancé par Lolla des Pogo Car Crash Control qui motive les filles à prendre une guitare et à monter sur scène. Le set du groupe ainsi que les jeux de lumières sont juste incroyables, et ils sont répartis sous une avalanche d'applaudissements plus que méritée.




Mon histoire avec Last Train a commencée avec la diffusion du titre "Fire" dans l'émission Pop Rock Station de notre cher Tonton Zégut. Après avoir entendu 2 ou 3 fois le titre passé dans sa cultissime émission, je me suis procurer leur premier ep, et c'est là que je suis tombé littéralement amoureux de leur musique, mais aussi de leurs concerts endiablés, car Last Train est un groupe de scène avant d'être un groupe de studio, et toutes les personnes les ayant vu jouer en live vous le diront. 




Contrairement à leurs amis de Bandit Bandit, les lumières se sont misent à nous éblouir avant l'arrivée de Tim (le bassiste) et Antoine (le batteur) pour entamer les premières notes du très endiablé "Dissapointed" avant de voir arriver Julien (le guitariste) et Jean-No (le chanteur/guitariste/frontman) sous une ovation digne de ce nom. Le groupe ayant repris les concerts depuis 2 jours est au taquet et heureux de pouvoir se reproduire sur scène dans le cadre d'une nouvelle tournée qui passe par de nombreuses villes en France, mais aussi en Hollande, Belgique et Allemagne. Le set est différent de celui qu'ils avaient avant la pandémie et fonctionne à merveille avec de nouvelles choses apportées sur plusieurs de leurs chansons comme ce magnifique medley entre "Jane" et "Beetwen Wounds" avec un Jean-No marchant sur la foule tel Jésus sur la mer avant de se jeter dedans avec sa guitare à la main.



Le groupe n'est pas resté à ne rien faire pendant l'année écoulée car en plus de nous avoir offert un magnifique documentaire intitulé "The Big Picture" (à voir ici), ils ont composé un titre de 20mn où se mêlent calme et tempête que l'on devrait voir arriver si leur label leur donne le feu vert pour le sortir. Et comme leurs amis de Bandit Bandit étaient présent ce soir là, Hugo et Maeva sont remontés sur scène pour nous interprèter le magnifique "Fragile" chanté en français par Maeva avant de clôturer par le très touchant "The Big Picture" qui clôture le 2ème opus des alsaciens. Ce qui me fera toujours halluciner avec Last Train,  c'est qu'ils n'en reviennent toujours pas des ovations qu'ils reçoivent à la fin de chaque concert. Ce groupe est pur et authentique, et d'une gentillesse incroyable si vous les croiser au merch après les concerts.




Donc, si vous voyez ces deux groupes passer près de chez vous, ne les ratez surtout pas, et vous pouvez retrouver les Bandit Bandit le 10 décembre à la Maroquinerie de Paris, et le prochain arrêt à bord du Last Train se fera pour moi le 22 mars pour une date unique à L'olympia qui s'annonce déjà comme une date à ne pas rater,  et un concert qui restera gravé dans les mémoires de ceux qui y seront.

Ce que vous venez de lire n'est pas réellement un live report, mais plus un carnet de bord d'un aficionado passionné par notre incroyable scène française. Soyez curieux et sortez aux concerts. 
Merci de m'avoir lu. Et merci encore à Nos Rêves Font Du Bruit.

Enjoy 🤘😜



Gian, novembre 2021

vendredi 12 novembre 2021

Hommage aux victimes du Bataclan : « Last night Brittany Howard saved my life »

Credits Photo : © Vancouver Observer

On dit souvent qu’écrire est un exutoire. L’expression ne saurait être plus juste aujourd’hui. Actualité oblige, cette chronique va prendre un tour plus personnel qu’à l’accoutumée. Elle aurait pu être la première écrite depuis la tragédie du 13 novembre 2015 qui a fauché la vie de tant de jeunes visages, dont le seul tort était d’assister à un concert de rock ou de savourer la vie un vendredi soir sur une terrasse parisienne.

Credits Photo : © Le Parisien

La montagne de roses de l’espoir déposées devant le Bataclan ainsi que les centaines de messages anonymes laissés en hommage, nous ont laissé sans mots les jours et les semaines qui ont suivi, sidérés par un acte d’une telle violence et d’une telle gratuité. L’ancien habitué du 11ème arrondissement que je suis était incapable d’écouter quoi que ce soit aussi. Léthargique, choqué, comme paralysé.

Credits Photo : © Midi Libre

Et puis, il a fallu s’y remettre. Doucement. Continuer. Pour ne pas se laisser abattre. Alors, le 1er disque qui s’est imposé naturellement sur ma vieille platine était le “Sound & Color” d’Alabama Shakes. Pourquoi revenir sur ce disque, paru 6 mois avant les attentats ?

Je vous l’avoue, ce disque je l’avais un peu mis de côté, repoussant l’échéance de son écoute jusqu’à finalement passer à autre chose. Rien d’anormal jusque-là, cela arrive régulièrement à un chroniqueur. Sauf que ce disque ne m’a jamais vraiment quitté. Six mois ont passé, et las de le voir traîner sur le meuble sur lequel trônait ma platine, je décide de l’installer dessus et de laisser le diamant de la platine se poser délicatement dessus. Et là, surprise… ou miracle plutôt, j’ai été stupéfait. Sa chaleur soul teintée de rage était plus en phase avec mon état d’esprit que jamais. Ainsi, “Sound & Color” est devenu ma première épaule de réconfort en cette période sinistre.


Ce 2nd album de la formation rock / soul originaire d’Athens en Alabama connut un énorme succès aux Etats-Unis et, emmenée par la panthère Brittany Howard, fut indubitablement l’un des meilleurs disques de cette triste année 2015. A vrai dire, rien ne me préparait réellement à une telle claque. Comme beaucoup, je gardais le souvenir d’un premier album en 2012, sympathique certes mais sans grande originalité, où se croisait une bonne dose de guitares rock 70’s et de soul fiévreuse. Quelques titres accrocheurs mais pas de quoi sortir du rang, même si on savait le quatuor doté d’une belle énergie sur scène.

Credits Photo : © L.A. Times

C’était donc sans compter sur la voix de Brittany Howard qui explose littéralement sur cette douzaine de compositions audacieuses. Un disque étrangement plus rugueux et profond, qui nous accueille pourtant avec un vibraphone et des orchestrations de cordes gracieuses en ouverture. Il ne faut pourtant pas s’y méprendre, le ton de l’ensemble se veut délibérément résigné, voire désespéré. Brittany Howard y règle ses comptes avec sa famille disloquée. A ce titre, “Sound & Color” est un grand disque de soul dramatique.

Pochette de l'album "Sound & Color" d'Alabama Shakes (2015)


Cette noirceur, Brittany Howard la chante avec une force surhumaine. La part de masculinité de cette jeune femme noire cachée derrière ces petites lunettes, à l’opposé des canons esthétiques d’une Beyonce, fait d’elle la légataire musicale d’Otis Redding. Une voix à la fois puissante et terriblement hantée - comme dans “Gimme All Your Love” qui nous emporte avec lui dans un tourbillon. Un tourbillon noir, mais non dénué de pulsions groovy. Avec le tubesque “Don’t Wanna Fight”, la guitare truffée de gimmicks groovy d’Heath Frogg fait résonner le morceau comme un classique instantané.


Face à un tel ouragan vocal, le reste du groupe tempère magistralement, évite le piège délicat de verser dans l’emphase, avec toujours une justesse naturelle dans le déroulement du morceau, et un sens dramaturgique d’une finesse sans égal aujourd’hui : notamment dans la soul latente de “Dunes”, “Feeling” seul note teintée d’espoir, ou encore le surprenant “Future People”, qui rappelle un TV on The Radio qui aurait échoué en 1973. Côté contre-pied, le clin d’oeil de “Shoegaze” est tout le contraire de ce qu’il laisse pourtant indiquer, sec et claquant. Ultime pied de nez sur “The Greatest”... avec ce titre, la diva black et ses 3 rednecks signent probablement le meilleur morceau de ces blancs becs de Strokes depuis leur 1er album.


La veille du drame du Bataclan, les Alabama Shakes ouvraient le festival des Inrocks au Casino de Paris. Leur prestation fut de l’avis général mémorable. Un dernier rayon de soleil avant de plonger dans l’obscurité des ténèbres. Et comme un pied de nez au destin, ce sont eux qui m’ont sorti de l’obscurité. Last night Brittany Howard saved my life. Mon seul regret fut qu’elle ne puisse ramener ceux qui sont injustement partis trop tôt...


Texte rédigé en mémoire des victimes innocentes des attentats du Bataclan, « des terrasses » et du Stade de France, ainsi qu’à leurs familles. Nous ne vous oublions pas ! Je voudrais également avoir une pensée particulière pour celles & ceux qui ont perdu un(e) proche durant cette sombre journée.


Credits Photo : © DarkRoom

Credits Photo : © Bataclan

Credits Photo : © Boris Allin

Credits Photo : © Alessio Neri


Dessin : © Dadou

Credits Photo : © Groland

Credits Photo : © Life in Paris


Manu de RAN