vendredi 19 juin 2020

Album Review : "Sideways To New Italy" de Rolling Blackouts Coastal Fever (Sortie le 05.06.2020)

Credits Photo : © Libération
La vie est rarement un long fleuve tranquille, comme la réalité nous l’a rappelé récemment. Et c’est encore moins le cas lorsque vous passez votre vie sur la route. Avant le confinement, le groupe originaire de Melbourne Rolling Blackouts Coastal Fever - composé de Tom Russo, Joe White & Fran Keaney à la guitare & au chant, Joe Russo à la basse et Marcel Tussie à la batterie - a effectué 18 mois de tournée mondiale éreintante, et il semble que le temps passé à voyager les a incité à se remettre en question, ce qui peut surprendre lorsque l’on sait que les 2 premiers EP du quintet - “Talk Tight” en 2016 & “The French Press” en 2017 - étaient parfaitement en phase avec l'identité sonore du groupe. Ces disques offraient un rock indé efficace porté par des guitares dansantes, des harmonies décontractées et des paroles ensoleillées.
Credits Photo : © Chunky Glasses
Ce qui faisait la beauté du son des australiens c’était sa simplicité. Chez Rolling Blackouts Coastal Fever, pas d’artifices fantaisistes, juste une écriture magistrale. Leur 1er album sorti en 2018 - “Hope Downs” - approfondissait cette approche, comme si un groupe de potes jouait de la musique en se contentant d’apprécier les plaisirs simples de la vie. Mais leur 2nd disque “Sideways To New Italy” se révèle être un peu plus complexe.
Credits Photo : © Stack
Cette nouvelle collection de 10 chansons voit le groupe australien revenir à ses origines et se redécouvrir. Le titre de l'album fait ainsi référence à New Italy, un village près de la maison d'enfance du batteur Marcel Tussie à Bellingen, en Nouvelle-Galles du Sud. Cette destination idyllique est devenue une sorte de refuge pour les membres du groupe. Musicalement, l’euphorie du 1er opus demeure. L’ouverture “The Second Of The First” est construite à partir du groove caractéristique du groupe et une vraie cohésion se dégage de la prestation des 3 vocalistes. Malgré des sons ensoleillés, un monologue imprégné de confusion et de mélancolie a été habilement glissé au milieu de la piste.
Credits Photo : © Flaunt Magazine
Si la sublime “Falling Thunder”, la très efficace “She’s There” - portée par ses guitares mélodieuses & son énergie contagieuse rappelant R.E.M. et The Go-Betweens - ou la très cool “Cameo” aux sonorités délicatement surf rock ne manqueront pas de vous régaler, l’addictive “Cars In Space” ressemble déjà à un hit et trouve Rolling Blackouts Coastal Fever réfléchissant aux sentiments et à l'excitation ressentis lorsque vous passez votre vie sur la route. Avec ses explosions d'harmonica, “The Only One” nous offre encore davantage d'intimité, explorant le soulagement du retour à la maison. “Not Tonight” présente ensuite un refrain mélancolique - rempli de paroles douloureuses - que ne renierait pas Elliott Smith.
Credits Photo : © Sunny Martini
Il est toujours fascinant d’assister à l’émergence d’un groupe majeur, et c’est précisément ce qui est en train de se passer avec ce 2ème album de Rolling Blackouts Costal Fever. Sur leur excellent 1er effort, ils se sont révélés comme les héritiers naturels de ce rock des années 80, porté par une section rythmique entraînante. En apportant un zeste de mélancolie à leur rock indé ensoleillé, les australiens nous montrent qu’ils ont encore progressé. Qu’ils se frottent à la new wave dans “The Only One” ou à R.E.M. dans “The Cool Change”, ils parviennent toujours à se façonner une identité brillante et riche.
Credits Photo : © Beat Magazine
Si “Sideways To New Italy” ressemble au rock indie gorgé de soleil de “Hope Downs”, il y a néanmoins pas mal d’angoisse enfouie dans ce disque. Pourtant, cet album sonne aussi comme le fruit du travail d’un groupe qui prend son pied à être en studio ensemble, tant la chaleur et l’amitié suintent à la moindre note. Les lignes vocales et instrumentales entrelacées des 3 chanteurs-guitaristes rappellent certes toujours la magnificence pop de The Go-Betweens, mais les rythmes frénétiques impulsés dans cet opus donnent à leurs chansons un sentiment d'urgence nouveau. Après 18 mois en tournée, Rolling Blackouts Coastal Fever s’est ressourcé chez lui et il semble que ses membres se soient trouvés à travers cette romance estivale mélodique et enlevée.


La Note de Manu : 8/10
Pochette de l'album "Sideways To New Italy" de Rolling Blackouts Coastal Fever (sortie le 05.06.2020)
“Sideways To New Italy” de Rolling Blackouts Coastal Fever, LP 10 titres sorti le 05 juin 2020 chez Ivy League Records / Sub Pop Records

Tracklist :
1. The Second Of The First (3:40)
2. Falling Thunder (4:06)
3. She’s There (3:44)
4. Beautiful Steven (3:49)
5. The Only One (3:47)
6. Cars In Space (4:58)
7. Cameo (4:07)
8. Not Tonight (4:00)
9. Sunglasses At The Wedding (3:33)
10. The Cool Change (4:03)


Credits Photo : © Peter Ryle
Credits Photo : © Aaron Corr
Credits Photo : © Peter Ryle


Manu de RAN

mercredi 17 juin 2020

Album Review : "FLIGHT" de Hanni El Khatib (Sortie le 15.05.2020)

Credits Photo : © Sensation Rock
Hanni El Khatib a toujours entretenu un certain paradoxe : vous vous imaginiez que sa prolificité s’expliquait par un esprit foisonnant boosté par la joie et le plaisir. Son dernier album “Savage Times” - sorti en 2017 - semblait étayer cette impression, à travers ses 19 titres balayant un spectre musical très large, du blues au punk. Mais la réalité est bien moins reluisante, puisque ce stakhanovisme relatif est en fait dû à une série de dépendances, qui ont poussé le Californien à se lancer dans un cycle de création sans relâche, afin d’atténuer les effets de ses addictions.
Credits Photo : © Nick Walker
Pourtant, après la sortie de “Savage Times”, Hanni El Khatib a voulu casser cette spirale autodestructrice et prendre le temps de se soigner, effrayé à l’idée de sombrer définitivement dans la dépression. Enfin libéré de certains de ses démons intérieurs, le Californien est de retour 3 ans après, avec un 5ème album intitulé “FLIGHT”, où HEK retrouve le plaisir de la musique. L’album de la renaissance en quelque sorte…
Hanni El Khatib @ La Cigale, Paris - Source : © Facebook Officiel Hanni El Khatib
Avec ce nouveau disque, Hanni El Khatib entérine son nouveau statut d’artiste mélancolique, voire clairement saturnien. L’une des raisons pour lesquelles j’apprécie tant ce “FLIGHT”, c'est qu'il me rappelle un album qui compte beaucoup pour moi, “The Idiot” d’Iggy Pop. Car à l’instar de “The Idiot”, “FLIGHT” voit Hanni El Khatib jouer avec ses auditeurs, les taquiner, les perturber voire les provoquer, mais en le faisant toujours de manière charmante et parfois éblouissante. Et ce qui est également réjouissant dans ce disque, c’est d’imaginer HEK s’amuser comme un gosse en nous désarçonnant.
Credits Photo : © Nick Walker
“FLIGHT” est donc un album mélancolique, graisseux, moite, un album qui transpire ce rock que le songwriter californien ne cesse de réinventer. Ce disque marque essentiellement parce que HEK y développe de nouvelles sonorités tout en conservant également sa patte stylistique et qu’il remet ainsi sa carrière sur de bons rails. En effet, dans cet opus, les genres changent à chaque morceau, comme des couleurs qui finiraient par se mélanger sur la palette d’un peintre.
Credits Photo : © France Inter
L’ouverture “CARRY” gronde sur un rythme vrombissant, grinçant et séquencé tandis qu'Hanni El Khatib hurle en arrière-plan. Cela sonne comme si Suicide avait été chargé d’écrire une chanson pour la B.O. d’un jeu vidéo comme FIFA. Ensuite, vous avez “GLASSY”, dont le titre peut paraître trompeur. “Creepy” ou “sketchy” aurait peut-être été plus approprié, tant les claviers tourbillonnants de la piste nous plongent dans un état second, une sensation proche du mal de mer.
Credits Photo : © Snappp
Sur “ALIVE”, le Californien bouleverse les idées reçues et construit un morceau addictif inspiré par la soul et le funk. Vous retrouvez ensuite le rock de mauvais garçon typique de HEK sur “COLORS", puis un rock quasi-industriel avec l’excellente et surprenante “STRESSY”, où la voix du songwriter fait merveille, avant de vous manger en pleine tronche l’un des moments forts de ce disque : l’hymne sensuel et nonchalant “ROOM”, doté d’un piano hypnotique.
Credits Photo : © Dustin Aksland
Il est difficile de ressortir du lot 1 ou 2 chansons, tant ce “FLIGHT” - réalisé en collaboration avec la tête pensante d’El Michels Affair, Leon Michels - est un opus dense, riche et spontané qui convoque aussi bien le rock que le blues, la soul et même le trip hop. “LEADER” peut toutefois être mise en avant de par ses sonorités orientales et sa voix plaintive rappelant à certains égards ce sex-appeal brut que Mick Jagger a souvent glissé dans ses chansons. Et apparemment, écrire sur son animal de compagnie semble être à la mode chez les rockeurs californiens puisqu’après Ty Segall et son “Fanny Dog” - extrait de “Freedom’s Goblin” en 2018 - c’est Hanni El Khatib qui déclare sa flamme à sa chienne dans le titre “HARLOW”. Celle-ci se verra d’ailleurs également offrir les honneurs de la pochette de l’album.
Source : © Facebook Officiel Hanni El Khatib
Alors certes, cet album n’est pas l’oeuvre la plus accessible d’Hanni El Khatib, ni la plus réussie d’ailleurs, et je suis curieux de découvrir comment le Californien réussira à la transposer en live. Mais il faut reconnaître que la maîtrise et la grande diversité de ce “FLIGHT” sont impressionnantes, de même que sa spontanéité. Avec ce joyau brut, Hanni El Khatib sublime son garage traditionnel et nous montre qu’il n’a probablement pas fini de nous étonner. L’album se conclut sur le titre “PEACE”. Le Californien aurait-il trouvé la paix intérieure ? Ce disque ambitieux et riche porté par sa voix suave nous apporte une première réponse…


La Note de Manu : 8/10
Pochette de l'album "FLIGHT" d'Hanni El Khatib (sortie le 15.05.2020)
“FLIGHT” de Hanni El Khatib, LP 13 titres sorti le 15 mai 2020 chez Innovative Leisure Records / Because Music

Tracklist :
1. CARRY (1:41)
2. GLASSY (1:07)
3. ALIVE (2:55)
4. COLORS (1:12)
5. STRESSY (2:53)
6. ROOM (3:25)
7. LEADER (3:31)
8. GEM (2:29)
9. HARLOW (2:13)
10. DUMB (1:57)
11. HOW (3:29)
12. DETROIT (1:54)
13. PEACE (2:26)


https://www.youtube.com/playlist?list=OLAK5uy_kfBBk4yE4WJkZjvrFTE6nF6yQTY1q8CoU
Source : © Facebook Officiel Hanni El Khatib


Manu de RAN

jeudi 11 juin 2020

Album Review : "Hara" de Dätcha Mandala (Sortie le 05.06.2020)

Credits Photo : © Julien Dupeyron
Après un 1er LP - intitulé “ROKH” - qui m’avait déjà laissé sans voix en 2017, les bordelais de Dätcha Mandala reviennent nous régaler les tympans avec “Hara”, un 2nd album brûlant publié le 05 juin dernier.
Au fil des années, le trio de heavy blues semble avoir trouvé l'équilibre parfait entre pensées matérielles et spirituelles, nous offrant ainsi une expérience sensorielle directement inspirée de l'effervescence sonore des années 70. A travers ce 2ème opus, les rockeurs bordelais - Nicolas Sauvey à la basse, à la guitare acoustique, à l’harmonica & au chant, Jérémy Saigne à la guitare & aux choeurs et JB Mallet à la batterie & aux choeurs - séduisent par leurs guitares puissantes, leurs voix transcendantales et leur énergie généreuse. Leur esthétique musicale s'inscrit ainsi dans une sorte de psychédélisme mystique sous influences orientales.
Credits Photo : © Julien Dupeyron
Depuis 2009, Dätcha Mandala s’est taillé une solide réputation en live en assurant plus de 550 concerts à travers toute l’Europe, ainsi qu’en Amérique du Nord. En 2017, ils ont même joué en soutien des légendes du rock français Les Insus - anciennement Téléphone - au Stade de France devant 35.000 personnes, c’est vous dire ! La même année, ils ont sorti un 1er album prometteur et entièrement analogique “ROKH” chez Mrs Red Sound, le label fondé par Mars Red Sky. Disque produit par Clive Martin, qui a officié précédemment aux côtés de Queen, Thom Yorke, The Cure, Midnight Oil ou Skunk Anansie entre autres. Des centaines de concerts plus tard, les prodiges français ont repris le chemin du studio pour enregistrer ce 2ème disque “Hara”, sorti le 05 juin dernier via Mrs Red Sound.
Source : © Facebook Officiel Dätcha Mandala
Le groove percutant et les riffs bluesy & lourds de “Stick It Out” - rendus encore plus accrocheurs par le chant old school de Nicolas - sont véritablement très attrayants et entament le disque de la plus belle des manières. On enchaîne ensuite avec le twang poussiéreux de guitare de “Mother God” et le tempo optimiste de “Who You Are”, rendu encore plus pêchu et charmant par le son de son harmonica. S’ensuit le mélange country-blues de “Missing Blues” qui, s’il est bien agréable, n’est cependant pas le plus gros point fort de ce disque. “Morning Song” nous ramène dans des ambiances un peu plus “moelleuses” où le clavier, la prestation vocale de Nicolas et les mouvements souples et précis de JB derrière ses fûts nous charment aisément.
Credits Photo : © Julien Dupeyron
A ce stade, il convient de préciser que “Hara” est un album des plus variés, sans pour autant perdre trop de vue ce rock inspiré typique des années 70, qui est la marque de fabrique de Dätcha Mandala. Délivrant une musique suffocante qui suinte le rock à chaque instant, le trio bordelais nous régale une nouvelle fois avec ce “Hara” blindé de titres accrocheurs comme le merveilleux single “Sick Machine”, tandis que d’autres morceaux comme “Moha” nous offre un groove de basse hallucinogène du plus bel effet, et que “Eht Bup” lorgne du côté sauvage des musiciens, convoquant les influences illustres telles que Black Sabbath ou Kyuss.
Credits Photo : © Fred Lombard / Indie Music
A travers cet opus éclairé qui transpire ce rock n’ roll bluesy que l’on aime tant, Dätcha Mandala nous montre l’étendue de sa palette stylistique et délivre une avalanche - que dis-je, une rafale - de riffs et de percus qui aboutissent dans une sorte de décharge d’adrénaline, d’apothéose hard rock / metal avec le titre de clôture “Pavot”.
Credits Photo : © Julien Dupeyron
Imaginez-vous que vous avez déjà envie de vous précipiter chez votre disquaire, alors que je n’ai pas encore évoqué les pistes “Tit’s” & “On The Road” qui - avec son groove lent - évoque l’âge d’or de Crosby, Stills & Nash et nous transporte sur les routes poussiéreuses du midwest américain, berceau du rock dont Dätcha Mandala est l’un des meilleurs ambassadeurs. Que vous dire de plus pour vous convaincre de vous précipiter sur ce “Hara” ? Pas grand chose, si ce n’est qu’avec son immense musicalité et ses solos épiques, on tient incontestablement ici l’un des meilleurs albums rock de cette année tout simplement. Le cri du coeur d’une génération inspirée et inspirante !


La Note de Manu : 8.5/10
Pochette de l'album "Hara" de Dätcha Mandala (sortie le 05.06.2020)
“Hara” de Dätcha Mandala, LP 11 titres sorti le 05 juin 2020 chez Mrs Red Sound / Idol Records

Tracklist :
1. Stick It Out (3:24)
2. Mother God (3:42)
3. Who You Are (3:38)
4. Missing Blues (2:19)
5. Morning Song (4:59)
6. Sick Machine (4:14)
7. Moha (4:39)
8. Eht Bup (3:52)
9. Tit’s (4:49)
10. On The Road (4:02)
11. Pavot (6:20)


Credits Photo : © Julien Dupeyron
Credits Photo : © Julien Dupeyron
Credits Photo : © Mrs. Red Sound


Manu de RAN

jeudi 4 juin 2020

Album Review : "What Kinda Music" de Tom Misch & Yussef Dayes (Sortie le 24.04.2020)

Credits Photo : © The Line Of Best Fit
Certain(e)s d’entre vous pourraient s’interroger sur la raison qui m’a poussé à chroniquer l’album de la semaine sur Rock Alternative News car la 1ère question qui se dégage de son écoute est : “de quelle musique s’agit-il ?”. C’est effectivement une très bonne question. S’agit-il de jazz indépendant ? De jazz rock ? De hip hop ? De R&B avec des notes d'électro ? Sans un peu tout cela à la fois. Mais comme l’indique le titre de ce disque, il n’est pas nécessaire de répondre à cette question car cela n’a vraiment pas d'importance !
Portant le flambeau du nouveau jazz contemporain, les 2 amis originaires de Londres Tom Misch & Yussef Dayes se sont associés pour créer un projet engageant, éclairant et novateur qui les emmène en territoire inconnu. Un voyage défini par des couleurs vives et un groove indéniable.
Credits Photo : © Les InRocks
Le jeune producteur et auteur-compositeur-interprète Tom Misch jouit d’une belle réputation depuis quelques années, grâce à son écriture mélodique entraînante qui a conquis une solide fanbase. A l’opposé, Yussef Dayes a traversé la scène underground jazz et a créé une signature sonore singulière avec son duo Yussef Kamaal. Se connaissant depuis des années puisque voisins dans le sud de Londres, le duo s'est réuni à l’occasion de la sortie du 1er album solo de Tom Misch “Geography”, qui est devenu le catalyseur de ce “What Kinda Music”. Bien que le duo provienne d'horizons musicaux différents, le projet montre qu'ils se complètent à merveille et mettent en évidence leur grande musicalité en puisant chacun dans l'énergie de l'autre.
Source : © YouTube
Dès l’ouverture, vous réalisez que “What Kinda Music” est une déviation du style musical précédent de Tom Misch. S’appuyant sur la vigueur des performances live et des jams, le disque n'est guère surproduit et aide à diffuser une atmosphère musicale planante. La piste-titre “What Kinda Music” nous plonge immédiatement dans des vibrations psychédéliques, propulsées par des synthés profonds, des voix surprenantes de Tom Misch, des cordes luxuriantes et les percus rythmées de Yussef Dayes. “Festival” résume l'esprit libre et tourbillonnant de ce rassemblement musical de 1er plan. Aussi pesantes que sont les incertitudes liées au coronavirus, la nostalgie & la félicité qui se dégagent de ce disque sont enivrantes.
Credits Photo : © The Line Of Best Fit
Ce paysage de rêve mélancolique se poursuit à travers les vibrations hip-hop West Coast de “Nightrider”, où nous retrouvons une superbe musicalité à l’écoute de la basse rythmique de Yussef Dayes et Tom Driessler. Les harmonies vocales de Tom Misch éclatent dans le refrain tandis que le couplet fluide de Freddie Gibbs correspond parfaitement à cette ambiance utopique que l’auditeur se forge mentalement. Pour terminer la 1ère moitié de l’album, nous décelons des formes sonores brillantes avec “Tidal Wave” à travers la juxtaposition de la batterie de Yussef Dayes et de la voix soyeuse de Tom Misch, tandis que la puissante voix d'Aretha Franklin est canalisée pour “The Real” pour créer ce qui s’annonce comme LA sensation jazz-soul estivale.
Credits Photo : © Lab.FM
La 2nde partie du disque - plus funky - débute avec “Lift Off”, une masterclass de prouesses musicales. La chanson regorge d'énergie et de vibrations, inspirées d'une conversation étonnante entre la basse pulsante de Rocco Palladino et la guitare de Tom Misch, tandis que la batterie inspirée de Yussef Dayes donne du liant entre les 2. “I Did It For You” et “Last 100” sont caractéristiques de ce son classique de Tom Misch, lumineux et aéré, tandis que la piste suivante “Kyiv” voit les musiciens donner libre cours à leur talent, présentant des passages instrumentaux de très grande classe, et me renforce dans mon sentiment que Yussef Dayes est sans doute l’un des meilleurs batteurs de la scène actuelle, tous styles confondus. La transe de “Julie Mangos” vous amène tranquillement et pose les fondations de la chanson finale “Storm Before The Calm”, qui est sûrement l'outro parfait à cet album où le rythme acharné de la batterie de Yussef Dayes permet au puissant saxophone de Kaidi Akinnibi de se lâcher complètement.
Credits Photo : © Francisco Morais Soares
Atmosphérique et immersif, “What Kinda Music” est un disque qui illustre très bien la force collaborative et utopique de la scène musicale contemporaine. Son approche émotionnelle et contemplative est enchanteresse et nous montre comment Tom Misch et Yussef Dayes, qui viennent d’univers musicaux différents, sont capables de tirer la quintessence de leur potentiel respectif et de le mettre au service de l'autre. Caressant différents styles et sons, avec “What Kinda Music”, les 2 musiciens britanniques créent une œuvre impressionnante et profonde, dont les expérimentations rappelleront par moments à certain(e)s Algiers. Une fusion inattendue entre le meilleur de 2 mondes, où la voix tournoyante et les synthés de Tom Misch offrent des vertiges pop aux basses sombres et à la batterie tendue de Yussef Dayes. Sans doute l’une des pièces maîtresses de ce printemps 2020 et l’antidote idéal contre le spleen...


La Note de Manu : 8.5/10
Pochette de l'album "What Kinda Music" de Tom Misch & Yussef Dayes
“What Kinda Music” de Tom Misch & Yussef Dayes, LP 12 titres sorti le 24 avril 2020 chez Blue Note Records

Tracklist :
1. What Kinda Music (3:50)
2. Festival (4:42)
3. Nightrider [Feat. Freddie Gibbs] (5:00)
4. Tidal Wave (4:09)
5. Sensational (1:24)
6. The Real (2:41)
7. Lift Off [Feat. Rocco Palladino] (5:18)
8. I Did It For You (4:01)
9. Last 100 (4:00)
10. Kyiv (3:30)
11. Julie Mangos (3:17)
12. Storm Before The Calm (3:05)


https://www.youtube.com/playlist?list=OLAK5uy_mfeAqKe0Xpi-sWPWjGUWyFgHLSi2c9CZ8
Credits Photo : © Lab.FM


Manu de RAN