vendredi 15 octobre 2021

Album Review : "Delta Kream" de The Black Keys (Sortie le 14.05.2021)

Credits Photo : © Les InRocks

A peine 2 ans après un “Let’s Rock” qui a autant divisé les fans et qu’été adoubé par la critique, les américains de The Black Keys nous reviennent avec un 10ème album intitulé “Delta Kream”. Un nouvel effort du duo Dan Auerbach / Patrick Carney qui - pourtant - tranche par rapport au reste de leur discographie, puisqu’il ne comporte aucune composition originale.

“Delta Kream” se révèle être donc un album de reprises de standards du blues popularisés en leurs temps par des pionniers du genre, tels que John Lee Hooker, à qui est emprunté “Crawling Kingsnake”, R.L. Burnside - auteur, par exemple, de “Going Down South” - ou encore Junior Kimbrough, à qui l’on doit, entre autres, “Do The Romp” et “Stay All Night”. Pourtant, pour quiconque connaissant un tant soit peu l’histoire du duo, l’arrivée de ce disque en guise d’hommage n’est guère une surprise.

Credits Photo : © Allyse Gafkjen

UN ALBUM EN GUISE DE RETOUR AUX RACINES BLUES DES BLACK KEYS

En effet, dès le 1er album des Black Keys, “The Big Come Up” en 2002, le duo reprenait une chanson de chacune des 2 idoles citées précédemment. Dan Auerbach et Patrick Carney récidivent donc presque 20 ans plus tard avec ce “Delta Kream” vibrant du groove hypnotique du hill country blues, qui permet aux 2 compères de revenir à leurs racines musicales profondes.

Credits Photo : © France Inter

Pour ce disque hommage, Dan Auerbach et Patrick Carney se sont adjoints le concours de 2 légendes du hill country blues : le guitariste Kenny Brown, ainsi que le bassiste Eric Deaton, qui ont tous deux eu l’insigne honneur d’évoluer aux côtés de certains des artistes repris dans “Delta Kream”, à commencer par Junior Kimbrough et R.L. Burnside. Si ces 2 musiciens sont ceux que Dan Auerbach admire le plus, les considérant même comme de véritables encyclopédies du hill country blues, cela a pourtant été un jeu d’enfant de les convaincre de collaborer avec les Black Keys. Une petite session improvisée ensemble, et le tour était joué.


En lieu et place du blues électrifié proposé habituellement par les Black Keys, cet album n’offre que peu d’envolées musclées, à l’exception des seuls “Poor Boy A Long Way From Home”, “Coal Black Mattie” et “Sad Days, Lonely Nights”. En effet, qui dit blues originel dit spleen et longues complaintes émotionnelles. Les vrais amateurs de blues organique ne sauraient cependant se plaindre de ces compositions où les guitares pleurent à l’infini avec, en toile de fond, la voix langoureuse du maître Dan Auerbach qui, tel un caméléon, peut aussi bien endosser le costume de bluesman que celui de rockeur.

Credits Photo : © Rock & Folk

A l’écoute de cet effort, une évidence s’impose rapidement : même si cela irrite au plus haut point Dan Auerbach, il est difficile de ne pas relever les multiples points communs que ce dernier partage avec un certain Jack White… En effet, non seulement ces 2 chanteurs-guitaristes ont grandement participé au « retour du rock » au travers de duos - les Black Keys pour l’un, et les White Stripes pour le 2nd - au début des années 2000, mais ils sont également des enfants de villes esquintées du nord-est des États-Unis : Akron (Ohio), longtemps capitale du pneu, pour le barbu des Black Keys et Detroit (Michigan), reine déchue de l’automobile, pour celui qui guide aussi les pas des Raconteurs et de Dead Weather. Et le parallélisme ne s’arrête pas là, puisqu’ils ont tous deux rallié la capitale de la musique traditionnelle américaine - Nashville, Tennessee - pour y ouvrir leurs propres infrastructures d’enregistrement, ce qui leur a permis d’assouvir leur passion pour les « roots music » américaines, les instruments et les supports vintage.


Ces deux rockeurs ayant flirté avec le punk et le garage ont toujours clamé leur fascination pour les pionniers du blues. Dan Auerbach est donc le 1er à concrétiser cette admiration sans bornes par une collaboration avec 2 piliers du hill country blues afin d’honorer 2 des figures de ce microcosme rural longtemps négligé, R. L. Burnside et Junior Kimbrough.

Credits Photo : © Joshua Black Wilkins

UN DISQUE QUI SENT L'AMERIQUE PROFONDE

Bien qu’il ne soit qu’un album de reprises, “Delta Kream” n’a pas volé sa place au panthéon des disques blues de référence, ne serait-ce que parce qu’il nous rappelle qu’il est bon parfois de s’éloigner de sa zone de confort, du rock et de ses grosses guitares pour lorgner vers des sonorités plus douces, mais pas forcément plus apaisées. A l’écoute de “Delta Kream”, force est de constater que les Black Keys, bluesmen du 21ème siècle, n’ont rien à envier aux légendes R. L. Burnside et Junior Kimbrough, tant leurs versions sentent à plein nez l’Amérique profonde, de Nashville à La Nouvelle Orléans, en passant par Memphis.


Comme souvent avec les Black Keys, cet album ne manquera pas de diviser : disque illustrant parfaitement la panne sèche d’inspiration du duo pour certains, œuvre majeure et indispensable pour d’autres. A titre personnel, je suis séduit car cet effort enregistré dans les conditions du live s’inscrit très bien dans l’histoire du duo. En effet, immergés dans la culture noire de ce Mississippi profond dès leur plus jeune âge, Dan Auerbach et Patrick Carney réalisent un vieux rêve avec ce “Delta Kream” au groove hypnotique, opèrent un retour à leurs racines blues et nous rappellent que la force de la musique américaine a toujours été son authenticité et son melting-pot.


La Note de Manu : 8.5/10

Pochette de l'album "Delta Kream" des Black Keys (sortie le 14.05.2021)

“Delta Kream” de The Black Keys, LP 12 titres sorti le 14 mai 2021 chez Nonesuch Records

Tracklist :

1. Crawling Kingsnake (6:08)

2. Louise (4:23)

3. Poor Boy A Long Way From Home (4:08)

4. Stay All Night (5:44)

5. Going Down South (3:48)

6. Coal Black Mattie (3:48)

7. Do The Romp (5:01)

8. Sad Days, Lonely Nights (5:57)

9. Walk With Me (5:36)

10. Mellow Peaches (3:47)

11. Come On And Go With Me (5:55)

12. Crawling Kingsnake [Edit] (3:52)



Credits Photo : © NME

Credits Photo : © Lemon Jelly


*NDLR : Chronique à retrouver ici => "Let's Rock" par Rock Alternative News



Manu de RAN

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