jeudi 26 mars 2020

Album Review : "Gigaton" de Pearl Jam (Sortie le 27.03.2020)

Source : © Site Officiel Pearl Jam
Voilà près d’une décennie que l’immense cohorte de fans du mastodonte historique du grunge Pearl Jam patientait en quête d’un album à se mettre sous la dent... En effet, dans notre société contemporaine où le culte de l’immédiateté et la recherche du plaisir instantané font loi, il faut reconnaître que 7 ans entre Lightning Bolt” en 2013 et ce “Gigaton”, cela peut sembler une éternité.
Source : © Kinepolis
Pour Pearl Jam comme pour tout groupe ayant dépassé le quart de siècle d’existence, la question de la pertinence se pose fatalement à un moment donné. Au fil des années, l’un des derniers dinosaures du grunge originel semblait avoir perdu de sa superbe, tant les dernières sorties - notamment “Lightning Bolt” en 2013 - ressemblaient davantage à une sorte de bouillis insipide qu’à du 1er choix. C’est la raison pour laquelle, comme de nombreux fans, j’attendais fébrilement ce 11ème album studio...
Crédits Photo : © NME
Pourtant, ce septennat d’attente semble avoir été salutaire au groupe mené par Eddie Vedder qui - pour la 1ère fois depuis très longtemps - s’empare avec bonheur des fléaux de notre temps, particulièrement le réchauffement climatique, pour nous livrer un 11ème album intitulé “Gigaton”, un disque certes imparfait mais qui rend néanmoins justice aux meilleures oeuvres du groupe. Soyons clairs : malgré ses défauts, cet opus est probablement le disque que l’on n’osait plus espérer de la part du quintet originaire de Seattle.
Crédits Photo : © Radio Canada
Après une intro brève et menaçante, le charme opère comme par magie avec “Who Ever Said”, qui sonne comme une version un brin moins vénère de “Brain Of J.”, titre d’ouverture de “Yield” en 1998. Inspiré par l’éclipse lunaire totale du 21 janvier 2019, le 2nd single “Superblood Wolfmoon” arrive rapidement dans la même veine que celle de l’album éponyme de 2006, avec des paroles sombres sur les relations amoureuses, vite interrompues par un excellent solo du guitariste Mike McCready. De nombreuses choses ont été dites & écrites sur la piste suivante “Dance Of The Clairvoyants”. “Un virage new wave étrange et raté” a-t-on pu lire ici et là... Ne nous emballons pas, il faut raison garder ! Même si ce n’est clairement pas la direction artistique que nous espérions les voir suivre, Pearl Jam y manipule néanmoins les sonorités électroniques avec un certain bonheur et parvient une nouvelle fois à surprendre agréablement en convoquant l’héritage de Talking Heads.
Crédits Photo : © Rolling Stone
Si j’étais circonspect à l’annonce de la collaboration du groupe avec le producteur Josh Evans, il faut reconnaître que le son tiédasse des 2 disques précédents semble bien loin. “Gigaton” adopte une approche bien plus équilibrée, revient aux fondamentaux du son de Pearl Jam et donne enfin au batteur Matt Cameron la place qu’il mérite. Vous vous en rendrez compte à l’écoute de “Take The Long Way” ou “Quick Escape”, un air à classer parmi les meilleurs travaux du percussionniste depuis son arrivée au sein du combo il y a 22 ans. “Quick Escape” est d’ailleurs indubitablement ma piste préférée, avec sa ligne de basse sale sublimée par Jeff Ament et la performance simple mais hyper efficace de Matt Cameron derrière ses fûts. Elle a également donné l’occasion à Eddie Vedder de laisser libre court à sa passion pour la science-fiction.
Crédits Photo : © Rolling Stone
Si la jolie “Alright” incite à la sérénité, sur l’efficace “Never Destination”, les membres du groupe font le parallèle entre les problématiques sociétales actuelles et la politique américaine. Il y a bien longtemps que nous n’avons pas connu le quintet aussi concerné par les fléaux de notre société - la présidence déplorable de Donald Trump en tête - et ça leur réussit très bien ! A partir de “Take The Long Way”, Pearl Jam tente de proposer différentes ambiances, avec plus ou moins de bonheur, tantôt avec des morceaux rock - aux tonalités parfois psychédéliques - portés par la voix puissante d’Eddie, tantôt avec des ballades faisant penser aux différents travaux de Vedder en solo, comme “Comes Then Goes”.
Crédits Photo : © Hardforce
Après avoir abordé le réchauffement climatique dans plusieurs des pistes précitées, la planante “Seven O’ Clock”, la très 80’s “Retrograde” et la piste de clôture gorgée d’orgue “River Cross” délivrent un message d’avertissement et d’espoir au genre humain. Pas de doutes… après de nombreuses années de vaches maigres, Pearl Jam retrouve son engagement militant et parvient à le sublimer dans cet effort réussi au-delà de toutes espérances.
Crédits Photo : © Rolling Stone
Alors que notre société sombre actuellement dans le chaos climatique et sanitaire, “Gigaton” nous invite à une évasion musicale à la hauteur des artifices mis en place par le groupe pour sa promotion. En effet, après avoir convié les fans à une chasse à l’artwork dans de nombreuses villes à travers le monde et avoir créé une application de réalité augmentée lunaire pour dévoiler “Superblood Wolfmoon”, ce nouvel album fusionne le grunge, le punk et le rock psychédélique et se révèle être un voyage émotionnel et politique, sans doute la meilleure oeuvre de Pearl Jam depuis très longtemps.
Credits Photo : © Alessandro De Vito
Si le disque perd un peu de son élan et que l’énergie semble s’essouffler par moments aux ¾  de l’album, les paroles alternent engagements personnels et appels aux armes, et rappellent les meilleures heures du groupe. Comme le prophétisait l’un de leurs fans les plus acharnés, Pearl Jam a su évoluer avec son temps. Ces gars-là n’ont pas fini de nous étonner… et on ne peut que s’en réjouir !


La Note de Manu : 8.5/10
Pochette de l'album "Gigaton" de Pearl Jam (sortie le 27.03.2020)
“Gigaton” de Pearl Jam, LP 12 titres sorti le 27 mars 2020 chez Monkeywrench Records / Universal Music


Tracklist :

1. Who Ever Said (5:11)
2. Superblood Wolfmoon (3:50)
3. Dance Of The Clairvoyants (4:25)
4. Quick Escape (4:47)
5. Alright (3:44)
6. Seven O’Clock (6:14)
7. Never Destination (4:17)
8. Take The Long Way (3:42)
9. Buckle Up (3:37)
10. Comes Then Goes (6:02)
11. Retrograde (5:22)

12. River Cross (5:53)

https://www.youtube.com/playlist?list=OLAK5uy_nFVBfM5ViENs6t3N-dwzJkNTJpLLy4S_E
Crédits Photo : © Vacarm.net
Crédits Photo : © Rolling Stone
Crédits Photo : © E.T. Canada



Manu de RAN

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