Rock Alternative News : Album Review : "Diabolique" de L'Epée (Sortie le 06.09.2019)

Credits Photo : © Muzzart

« J’ai fait un rêve, on faisait un groupe et on s’appelait L’Epée ». C’est dans ces termes que le charismatique leader du Brian Jonestown Massacre Anton Newcombe présenta à l’actrice aux allures de femme fatale Emmanuelle Seigner l’idée un peu farfelue - mais pas tant que ça au final - de monter un nouveau super groupe psychédélique. Portés par un esprit de corps, de partage et par l’alchimie indéniable qui transpire entre eux, le californien hyperactif et la blonde placide ont rallié à leur cause le duo le plus fuzzy de France The Limiñanas pour former ce qui est sans doute le super groupe le plus enthousiasmant depuis un bon moment.

Credits Photo : © Radical Production

Habile mélange de garage, de rock psychédélique, de pop 60’s et de B.O. de westerns spaghetti, L’Epée sublime les influences de ses illustres membres et transcende les frontières artistiques et traditionnelles. L’extraordinaire énergie de ses membres est canalisée dans un 1er album hypnotique, justement intitulé “Diabolique”, sorti le 06 septembre dernier.

Credits Photo : © Slate

Enregistré entre Cabestany et Berlin, “Diabolique” ressemble en bien des aspects aux derniers travaux de The Limiñanas. Influencés aussi bien par les yéyés, les Stooges que le Velvet Underground de Lou Reed, on retrouve dans cet album le même phrasé gainsbourg-ien, les mêmes instrumentaux épiques et les mêmes guests que sur le dernier album des Limiñanas, “Shadow People”. Le meilleur exemple en est leur compagnon Bertrand Belin, qui signe 3 textes magistraux de sa plume étincelante et qui assure le chant sur le titre “On Dansait Avec Elle”.

Credits Photo : © Vacarm

Comme dans l’oeuvre de Marie & Lionel Limiñana, la tracklist alterne morceaux chantés dans la langue de Molière et dans celle de Shakespeare, validant ainsi leur double identité et leur double culture. Tout au long de ces 10 morceaux jouissifs, les 4 compères délivrent leur fétichisme 60’s dans la droite lignée de la pop barrée et du surf rock des grandes heures du psychédélisme. Un peu comme si les Seeds & le Velvet Underground avaient revisité le “Melody Nelson” de Gainsbourg, comme dans le titre “La Brigade Des Maléfices”… Se revendiquant aussi de New York Dolls, The Jesus And Mary Chain ou encore des yéyés, ce ménage à 4 explore autant de styles musicaux que d’ellipses, entre années 60 et 3ème millénaire, et semble avant tout largement influencé par le rock viscéral de Lou Reed. Un peu comme si Berlin et Cabestany était désormais en proche banlieue de la Grosse Pomme…

Credits Photo : © L'Humanité

Ainsi, on retrouve le style inimitable et diaboliquement efficace du duo catalan, avec toutefois ce supplément d’âme conféré par le génie créatif fascinant du leader du Brian Jonestown Massacre et par la voix hypnotique et sensuelle d’Emmanuelle Seigner dans des morceaux sublimés par des textes magistraux. Lionel & Marie ont donné vie à un album intéressant et riche, Anton l’a rendu encore plus sombre et psychédélique, pour notre plus grand bonheur. Il est difficile de ressortir un morceau du lot, tant les 10 pistes de cet opus sont réussies et forment un ensemble hétéroclite mais néanmoins hyper cohérent.

Credits Photo : © Les InRocks

S’affranchissant de l’aspect “à double tranchant” de ce nom de groupe, L’Epée sort de son fourreau et ça va fuzzer ! Jouant de l’alchimie évidente entre ses membres, L’Epée se frotte aux musiques dangereuses, tranchantes comme des lames de rasoir dont Anton Newcombe est coutumier, et nous livre un album de rock très aiguisé, éminemment cinématographique - comme dans “The Last Picture Show” -, follement psychédélique et enivrant. Comme Emmanuelle aime le répéter à longueur d’interviews : « Une épée, ça coupe des têtes mais ça peut aussi anoblir ». On ne peut que lui donner raison car, avec cet album fiévreux et envoûtant, L’Epée se révèle être incontestablement l’un des sérieux prétendants au trône 2019.

La Note de Manu : 9/10