mardi 23 juillet 2019

Album Review : "Raise Vibration" de Lenny Kravitz (Sortie le 07.09.2018)

Credits Photo : © Ouest France

Il ne fait aucun doute que le monde actuel est plongé dans une sorte de chaos. La liste de ses maux est malheureusement non exhaustive : la guerre, la corruption, les tensions raciales & religieuses, l’intolérance, le fascisme, la crise économique, l’égoïsme... Heureusement, dans cette période trouble, il demeure un refuge, un exutoire : la musique. Que vous cherchiez des réponses au climat ambiant malsain, ou que vous cherchiez tout simplement un peu de réconfort, elle est toujours là, fidèle au poste, pour soulager votre âme en peine. La vie de Lenny Kravitz en est une parfaite illustration : Né d’une mère d’origine bahaméenne & d’un père juif ukrainien, très jeune, il fréquente le gotha de la musique d’après-guerre - vous connaissez peut-être cette photo de lui jouant du piano sur les genoux de la légende du jazz Duke Ellington - et voit son environnement familial s’écrouler à tout juste 21 ans, lorsque ses parents divorcent. A cet instant, il se tourne vers la musique, comme d’autres se tourneraient vers la religion. Voulant transformer ses souffrances en énergie positive, il se lance dans la musique - le rock n’ roll précisément - et sort son 1er album en 1989, “Let Love Rule”. L’album “Mama Said” suivra 2 ans plus tard, en 1991, et Lenny Kravitz connaîtra ce qui est peut-être l’apogée de sa carrière avec “Are You Gonna Go My Way” en 1993, qui connaîtra le succès public et critique au-delà de toutes espérances.

Lenny Kravitz & son père, Sy - Credits Photo : © Skyrock

Je dois vous le confesser un peu honteusement : j'ai découvert Lenny Kravitz sur le tard, avec la sortie de son album “5” en 1998. A une époque où mon univers musical était principalement orienté vers le hip-hop, j'ai pris une véritable claque en entendant à la radio son tube “American Woman”, et il m'a donné envie de me repencher sur la question du rock. Depuis, Lenny ne m'a plus jamais quitté, m'accompagnant dans les moments heureux au son de “Fly Away”, “Let Love Rule” ou “Again” et me réconfortant dans les épreuves de la vie avec “American Woman”, “Where Are We Runnin” ou “It Ain't Over 'Till It's Over” (entre autres).

Durant ses près de 30 ans de carrière, Lenny Kravitz a toujours véhiculé un message de paix, d'amour et de tolérance, qui se retrouve une nouvelle fois dans ce 11ème album studio “Raise Vibration”, qui unifie toutes ses influences sonores, du Rock N’ Roll à la Soul en passant par le Blues des champs de coton du Mississippi. Lorsque l’on connaît les “antécédents” du garçon, rien de surprenant donc à ce qu’avec cette nouvelle production, il sublime la pop et le funk en les remettant au goût du jour à la sauce Leonard Albert Kravitz (le vrai patronyme de Lenny). En effet, pour la sortie de cet album - son 11ème en format “studio” & le 1er depuis “Strut” en 2014 -, le New-Yorkais a souhaité revenir à ses premières amours en publiant un opus un peu plus funky. Et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il ne déçoit pas avec ce “Raise Vibration”. Au menu : des riffs de guitare, un héritage soul & funk, de la colère, et quelques fantômes...

Credits Photo : © Nostalgie.be

Composé - comme son prédécesseur - de 12 morceaux, Lenny Kravitz a adopté sur ce “Raise Vibration” une approche décontractée et home made, puisque le rockeur a quasiment tout effectué lui-même, de l’écriture à la production. Toutefois, l’ex-Monsieur Vanessa Paradis ne s’est guère transformé en doux rêveur, et est toujours plus que jamais indigné, révolté & décidé à éveiller la conscience sociale de ses contemporains quant aux nombreux fléaux de notre société, le racisme et le manque d’altruisme notamment. Pour autant, cet opus n’est pas envahi par la haine & l’aigreur. L’écriture hors du commun de Lenny Kravitz lui permet d'exploiter ses émotions pour créer une oeuvre positive empreinte de tolérance. Bref, un album en forme de tourbillon émotionnel qui vous promet une heure de musique exaltante & rafraîchissante.

Credits Photo : © Men's Up

En effet, “Raise Vibration” s’avère être un album à la fois grisant et mélancolique, avec une musique à l’image de son créateur : élégante et classique en même temps. Quand Lenny Kravitz est en mode groove - à mi-chemin entre le rock, la soul et le blues des années 70 -, il est toujours brillant. Porté par une inspiration quasi-juvénile, mais sublimé par 3 décennies d’expérience, ce disque est une œuvre audacieuse et brillante, qui confirme le retour en grâce du songwriter new-yorkais. Une fois encore, il a enregistré lui-même la plupart des instruments sur cet album, simplement accompagné par son ami guitariste Craig Ross et le claviériste David Baron. Lenny Kravitz ouvre sa boîte de pandore “Raise Vibration” avec “We Can Get It All Together”, un jeu de piste fascinant, qui nous montre - s’il en était besoin - que le rockeur est prêt à partir en reconquête. Puis vient le tour de “Low”, la chanson par qui tout est arrivée de l’aveu même du principal intéressé. Ce morceau aux notes de guitare funky, aux percussions flamboyantes & à la sensualité quasi-charnelle, Lenny en a eu la vision en rêve lors d’un retour aux sources sur l’île d’origine de sa mère (les Bahamas). Un rêve qui va accoucher d’un morceau diabolique qui réussira même le tour de force de faire revenir d’outre-tombe le légendaire Roi de la Pop Michael Jackson, avec qui Lenny Kravitz a enregistré un duo inédit. Cela peut sembler effrayant mais c’est aussi terriblement efficace, tutoyant l’oeuvre de Prince à certains instants.

Credits Photo : © Monterrey Rock

Tout aussi funky, “Who Really Are The Monsters ?” est un mélange de guitare virtuose et de danse addictive. Au-delà des mots, Lenny Kravitz maintient la pression sur cet hymne psychédélique anti-guerre, nous parle de notre tendance au jugement systématique envers les autres, et nous rappelle aussi la nécessité d’être unis pour faire face aux problèmes sociétaux actuels. Il réussit merveilleusement à retranscrire une ambiance à la Marvin Gaye - un de ses principaux influenceurs -, tout en s'attaquant à de nombreuses thématiques : conflits raciaux, mortalité policière, guerre, écologie et réchauffement climatique (entre autres). De plus, si “Low”, “Gold Dust” et “It's Enough” sonnent vraiment comme du Stevie Wonder des grandes heures, “5 More Days 'Til Summer” ressemble à s’y méprendre au “My Sweet Lord” de George Harrison et caractérise tout le charme funky de la discographie du New-Yorkais.

Credits Photo : © Culturebox

Par ailleurs, la piste-titre “Raise Vibration” reprend le message central de l’album, à savoir que l’amour est la chose la plus puissante que nous puissions offrir aux autres. Il y a bien évidemment des moments plus personnels, comme l’épatante “Johnny Cash”, qui consacre l’amour filial, celui d’un fils qui a perdu sa mère, et qui raconte comment la légende de la country l’a aidé à supporter le décès de celle qu’il chérissait tant. Probablement le morceau le plus intime et le plus touchant de cet opus, avec l’émouvante “Here To Love”, véritable hymne universel à la puissance cathartique avec son gospel. Et si cela ne suffisait pas à vous faire pleurer, vous fondrez à coup sûr en découvrant la ligne de basse funky du single “It's Enough !”. Un album qui s’achève sur “I’ll Always Be Inside Your Soul”, une chanson qui sonne comme une version intimiste de “Let Love Rule”, ne peut être autre chose que brillant.

Credits Photo : © RFM

Les remises en question sont bien souvent salutaires et permettent d’aborder la vie sous un angle nouveau. Dans le cas présent, cette réflexion a eu pour résultat cet album groovy & funky, où - presque - toutes les chansons sont excellentes, du rock typiquement Kravitzien de “We Can Get It All Together” au brûlot “It’s Enough”, en passant par la sublime ballade “Johnny Cash”. Quant à l’hymne psychédélique “Who Really Are The Monsters ?”, il nous montre que lorsqu’il laisse libre court à sa fantaisie, Lenny Kravitz est inarrêtable, ou presque. Avec cet opus funk, mélodieux, éclairé et rayonnant, Lenny Kravitz fête en beauté ses 30 Glorieuses, et nous montre qu’il est bel et bien de retour en grande forme. Non pas que le New-Yorkais soit parti depuis si longtemps… mais d’une certaine façon, il semblait s'être un peu perdu en route, tant ses productions précédentes “It Is Time For A Love Revolution” (2008), “Black And White America” (2011) ou “Strut” (2014) semblaient sans inspiration au regard de sa discographie, même si elles contenaient tout de même de bons morceaux.

Credits Photo : © wstale.com

Avec “Raise Vibration”, on frise donc le sans faute et il faut se rendre à l’évidence : en sortant cet album qui évoque le voyage d'une voix & ses modulations - à travers son ambition vocale de s'ouvrir à tous les publics et de s'affranchir des codes -, Lenny Kravitz n’a rien perdu de son éclat. Mieux, à 54 ans, il a grandi en tant que musicien, compositeur & arrangeur, et est comme le bon vin : Lenny Kravitz se bonifie avec l’âge. Vulgairement qualifié de “Pop Star” par l'inconscient collectif, il a su se réinventer et - tel un phénix - renaître de ses cendres, pour sortir l'un de ses meilleurs albums. Vous qui lisez ces lignes, faîtes comme Lenny : pensez musique, vivez musique, rêvez musique... Bref, soyez la musique !


La Note de Manu : 8.5/10


Pochette de l'album "Raise Vibration" de Lenny Kravitz (Sortie le 07.09.2018)

“Raise Vibration” de Lenny Kravitz, LP 12 titres sorti le 07 septembre 2018 chez Roxie Records / BMG Rights Management.

Tracklist :
1. We Can Get It All Together (4:40)
2. Low (5:19)
3. Who Really Are The Monsters ? (5:19)
4. Raise Vibration (5:27)
5. Johnny Cash (6:18)
6. Here To Love (4:42)
7. It’s Enough (7:55)
8. 5 More Days ‘Til Summer (4:02)
9. The Majesty Of Love (5:49)
10. Gold Dust (5:08)
11. Ride (5:59)
12. I’ll Always Be Inside Your Soul (3:58)

Credits Photo : © Filipino Star Magazine
Credits Photo : © France 3

Manu de RAN

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